Au cœur du Pays du Perche sarthois, les deux bourgs de Semur-en-Vallon et de Coudrecieux, distants de seulement quelques kilomètres, ont fait l’objet d’une étude d’inventaire du patrimoine au cours du premier semestre 2020. Situés sur les franges nord du plateau calaisien, sur la ligne de partage des eaux entre les vallées du Loir et de l’Huisne, ces deux localités ont révélé de troublants points communs…
Des morphologies voisines, des origines communes ?
L’étude des cadastres napoléoniens de chacune des deux communes (1830 et 1834) révèle de nombreux points communs dans la morphologie des bourgs.
Ceux-ci apparaissent autour de leurs églises, romanes pour leurs parties les plus anciennes, flanquées du cimetière paroissial transformé en place au début du XIXe siècle. Un premier noyau de maisons entoure l’église, puis une rue unique (la rue des Sablons à Semur, la rue Principale à Coudrecieux) se borde progressivement d’habitations. Chaque bourg conserve cette forme intacte jusqu’au XIXe siècle.
Coudrecieux, la rue Principale. ©P.-B. Fourny
La forme particulière de ces bourgs, avec une église décentrée, une longue rue unique et une voirie secondaire peu développée, peut trouver plusieurs explications. Les églises occupent une position de carrefour sur les chemins reliant plusieurs petits centres économiques anciens importants à l’échelle local (Saint-Calais, Bouloire, Connerré, Vibraye).
L’implantation en milieu forestier (forêts de Vibraye et de La Pierre), au cours de campagnes de défrichement, a certainement impacté la morphologie des bourgs, de même sans doute que la contrainte foncière imposée par d’importantes seigneuries.
En effet, la présence du château de Semur ou du manoir seigneurial de la Cour de Coudrecieux, aux extrémités de chacune des agglomérations, semble contraindre le bourg à se développer dans la direction opposée. Néanmoins, on ne peut que se contenter d’hypothèses à cause de la pauvreté des sources écrites et de la rareté du bâti médiéval conservé.
Le château de Semur-en-Vallon. ©P.-B. Fourny
Concurrence et émulation aux XIXe et XXe siècles
L’exploitation des ressources de la forêt et notamment la présence d’une verrerie très active au hameau de la Pierre, ont donné à la région une certaine aisance au XIXe siècle qui se traduit dans la reconstruction de l’essentiel du bâti à cette époque. Les châtelains, soucieux de l’amélioration des conditions de vie, surenchérissent de libéralités, fondant dans chacun des bourgs des écoles privées pour filles, offrant les terrains nécessaires au déplacement du cimetière, finançant de nouveaux bâtiments publics (poste de Coudrecieux, presbytère de Semur).
Les municipalités, aux budgets modestes, s’attachent principalement à élever d’imposants groupes scolaires, en 1890 à Semur-en-Vallon au prix de vingt ans d’efforts, à Coudrecieux en 1908. Elles s’investissent également, assez tardivement, dans la construction de lavoirs publics aux formes et matériaux perçus comme modernes : en brique à Semur en 1934, en brique et béton à Coudrecieux en 1949… Pour ne citer que quelques points de comparaison parmi les nombreux possibles.
Groupe scolaire et mairie de Semur-en-Vallon. Détail de la façade. ©P.-B. Fourny
Les dissemblances relevées entre les deux bourgs semblent principalement liées au passage de la ligne ferroviaire Mamers-Saint-Calais (1873-1977) à Coudrecieux. Non seulement elle permet à cette localité de se développer, avec l’émergence d’un nouveau quartier, mais elle enrichit de façon notable la commune déjà favorisée par sa verrerie.
On rencontrera donc à Coudrecieux un bâti plutôt homogène, assez cossu voire bourgeois, proprement aligné sur la voirie. A l’inverse, Semur-en-Vallon conserve un panel de constructions assez hétéroclites, parfois encore en bois et en terre, bordant rues et places de façon peu régulière. Le bourg bénéficie toutefois, dans les années 1960, de l’implantation de l’usine de pièces automobiles Metaseval, qui entraîne la construction de nouveaux lotissements et emploie aujourd’hui plus de 200 personnes.
Coudrecieux, la rue de la Fontaine. ©P.-B. Fourny